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Passagers du silence, Ce devait être un recueil pour les
enfants ‒ peut-être en reste-t-il quelque chose ‒ et
puisqu’il n’est pas, pour eux, de poésie sans
mesure, des manières de sonnets. Votre
âme, disait l’autre, est un
paysage choisi. La mienne, près de la petite Romane, est une
volière. |
Extraits |
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Bois et jardins |
Eaux et marais |
Serre exotique |
Autres ciels |
.Turdus merula.
Ce chant allègre
dans les buis sombres
Six
notes
début d’Avril
au Portugal
Un léger fantôme en habit de deuil
Du fond de ma haie réveille étourdiment
Le
passé
moi aussi je l’ai cru moi aussi
Je me souviens d’avril et du Portugal
Des œillets rouges dans les cheveux des filles
Fanfares parfums flacons de vin vert
Quarante ans ont
passé
vient l’automne
On dit qu’aujourd’hui le Portugal est triste
Seul se souvient du bonheur disparu
Le fantôme qui habite ma haie
Et chante en étourdi l’allègre refrain
Transmis d’arbre en arbre à travers les
années
.Bubo bubo.
Mont du Grand Som Effigie de
silence
Une mince croix au milieu des nuages
Nous glissons glissons imperceptiblement
Prairie
déserte
forêt
vide longue
Patience à mourir sans secours de scapulaire
Une plaie au flanc où les mouches s’agglutinent
Immobile à jamais cloué sur la porte
Face à la haute dent de
pierre
demain
Précède
hier triste
et léger comme l’aile
Qui geignait autrefois dans la nuit troublant
Sous leurs sèches couvertures monacales
Les enfants
long dortoir lits de
fer
écoutant
Tomber du Grand Som la voix plaintive
Déesse incarnée enfuie à
jamais
.Ardea alba.
Ce roi sauvage membres tors
beau visage
Arraché aux tourments de la bataille My kingdom
For a horse ! par des moines charitables
Après cinq-cents ans à courir sur les
scènes
Boiteux orgueilleux bossu amoureux
Et séduire celles qu’il a fait
veuves ce
roi
Qui n’est plus qu’une dent sous le microscope
Bruns éclat de cote fragments de fémur
Retrouvés par hasard au chantier d’un parking
Voilà qu’on sait tout de lui où
né où grandi
Un lac à roseaux quoi mangé oiseaux blancs
Aux longs becs longs fémurs élégants
Et l’aigrette nuptiale sur le dos comme
Au chapeau des comédiennes
.Cygnus olors.
Stella in
Cygno observata a Joh.
Hevetia
et cinq jours avant lui
Un chartreux saignant au cou du
cygne
Tendu vers le nord les ailes déployées trouées
De blessures volant dans la
mitraille
Happant les balles comme des mouches
Celle-ci sur la carte cerclée de rouge Nova
1670 comme un œil
entouré de cils die
25 Julij un peu
au-dessus du cercle du cancer
S’allumant dans les pins s’éteignant renaissant
Étoile mystérieuse timide comme
Au firmament ces étoiles sans nom
Qu’aujourd’hui seulement son éclat dissipé
On peut connaître naine blanche
.Threskiornis aethiopicus.
Ce long instrument au galbe parfait
Ce n’est pas pour chercher dans la vase du Nil
Les vers (serais-tu toi aussi de cette folle engeance ?)
Ni pour complaire aux prêtres qui te croient
Un succédané des dieux écoute
L’homme au nez le Cyrano antique
Exilé chez les Gètes que la mer en
vain
A sauvé du naufrage et jeté sur les bords
Marécageux de la mer Noire d’où
sans relâche
Il envoie par vaisseaux ses tablettes de cire
Pour flatter les puissants et
tancer follement
Amis et ennemis ce long bec recourbé
Qui te déséquilibre la Providence
Nous l’a donné pour se gratter le cul
.Pihis sinensis.
Pensant à Guillaume c’est Lou que je vois
Son visage sa gorge ses hanches son
Qui sait qui va me lire un gamin égaré
Qui courra se déniaiser chez Kostrowitsky
Pensant à Guillaume je vois long et
souple
Cet oiseau infirme engendré à la Chine
Qui ne peut seul hanter le ciel et veut
Une compagne incessamment pihis pihis
Toi qu’un destin railleur n’a nanti que d’une aile
Comme en Asie sont les dragons et ici
Les courtisanes et qui bas la poussière
Sans t’arracher à ce ravin de larmes
Me voici comme toi solitaire
Oublié et banni du ciel…
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