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La déportation d'Hermès

Pièce radiophonique

(France Culture, 1987)
Digraphe n°36 (mai 1985)

La déportation d'Hermès est le récit du voyage de Saint-Paul depuis l'Asie jusqu'en Italie.
Un extrait a été publié dans Digraphe n°36 (mai 1985) consacré au Théâtre du mythe.


Ecoutez la pièce (1:25:10)
La pièce a fait l'objet d'une adaptation radiophonique pour le Nouveau Répertoire Dramatique de France Culture (7 février 1987). Réalisation Claude Roland-Manuel, avec : Michel Vitold, Jacques Dufilho, Pascal Mazzoti, René Renot, Armand Meffre, Jean-Paul Racodon et Maria Meriko.



 

    Extrait

 

    Paul – J'entrais dans une ville haute et superbe. Tu sais comme sont les rêves : Rien n'y a l'apparence ordinaire. À ses murailles, à la couleur de ses rues, aux visages rencontrés en chemin, je reconnus Tarse, ma ville natale. Pourtant c'est bien Jérusalem qui s'ouvrait devant moi. C'était le soir. De grandes ombres s'étendaient dans les vergers en contrebas. L'air était si pur qu'on y entendait le bruit de la mer. Je me dirigeai vers le temple. Je gravis les rues escarpées, absent, comme enlevé à moi-même. Sur les marches devant le parvis se tenait un groupe. Ils se tournèrent vers moi. L'un cria quelque chose, que je ne compris pas. Je les voyais, figés maintenant, avec leurs visages où d'atroces sentiments se peignaient. Je m'adressai à eux, mais ils ne semblaient pas m'entendre. Pourtant je remuais mes mâchoires, et je parlais : Et c'était en araméen, en grec, en hébreu! Mais en vain. Puis ils s'avancèrent et voulurent me prendre. Alors je m'enfuis. La nuit était venue tout à coup. La honte me brûlait. Peux-tu comprendre cela ? Dans les lieux mêmes où le Christ lui, ferme et inflexible, jusque dans la gueule de ses tortionnaires... Un grand vent s'était levé. L'orage prenait toutes les hauteurs. Cependant j'avais déjà gagné la mer. Un navire appareillait : J'y montai mystérieusement. Une force énorme bousculait le bateau. J'étais comme aveuglé, comme si un invisible éclair noir m'avait ébloui. Étais-je même à bord ? Ou n'est-ce pas moi seul qu'une puissance terrible emportait au-dessus de la mer ? Puis, je ne sais comment (avions-nous touché terre ?) j'avançais dans un pays étranger. Une terre couverte de soufrières. La nuit semblait y régner perpétuellement. Pourtant je voyais distinctement le paysage jusqu'à des distances incroyables. Mais quel secret était caché là que je ne comprenais pas ? J'avais ce sentiment étrange d'une terre inconnue, mais à laquelle j'étais lié, à qui j'étais destiné depuis toujours... Comment t'expliquer cela ? Et la douleur de nouveau réveillée, une douleur sans objet, déraisonnable... Je me surpris à désirer la mort. Dans un ultime sursaut je me réveillai! Et cette nuit de nouveau, tout baigné de sueur, la même douleur...




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